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Lectures, analyses et réflexions de Raphaël
25 août 2009

Visiter Amsterdam et s'instruire (suite et fin)

   Visiter Amsterdam et s’instruire (suite et fin)

            

La réaction de notre ami Ségou m’a fait comprendre que la suite de mes impressions que je n’osais livrer (peur d’être trop long) était bien nécessaire(pour descendre du vélo). La voici donc.

Un cosmopolitisme rassurant : On dit de Paris qu’elle est une ville cosmopolite. Mais quand celle-ci pèche par l’hétérogénéité des ethnies et des classes sociales de sa population, Amsterdam fait dans l’homogénéité. Mes longues marches à travers la ville ne m’ont pas mené à des quartiers plus  chinois, plus indiens ou africains. Et dans les foules des promeneurs, le mélange ethnique est encore plus frappant qu’à Paris. La diversité aussi.

Dès mon retour, le comportement de quelques groupes de jeunes noirs m’ont rappelé que je suis dans une société différente. Alors je me suis rappelé les paroles de l’écrivain Raphaël Confiant disant que la stigmatisation génère des comportements particuliers. C’est vrai !

HPIM0987

Le cosmopolitisme dans la restauration : Ici, les restaurants affichent sans complexe leur nationalité et l’on découvre ainsi des noms que l’on aura du mal à trouver ailleurs dans l’art de la table : péruvien, chilien, argentin, équatorien, laotien, malais etc… Aussi, les Hollandais sont obligés d’afficher « Restaurant hollandais ». Pas mal ! Une restauration plus diversifiée qu’ailleurs donc.

Le mélange des genres en architecture : L’immense Hôtel-restaurant en forme de pagode sur le port d’Amsterdam est une preuve absolue que les Hollandais - qui ont sillonné le monde - ne craignent pas le cosmopolitisme. Cette évocation de la Chine ou de la Malaisie sur ce célèbre port fait croire à un esprit différent qui se voit également dans l’association de l’ancien et du moderne partout. Finalement, tout cela apparaît très harmonieux. Il faut oser pour le croire !         

Priorité aux commerces de proximités : La Hollande compte-t-elle beaucoup de super marchés ?  A Amsterdam, je n’ai pas vu de super marchés avec d'immenses parkings pour voitures. Une multitude de petits commerces, si. A la différence des villes françaises, il semble qu’il n’y ait pas de quartiers commerçants et des quartiers non commerçants ou dortoirs. Ainsi pas besoin de prendre la voiture puisqu’on a tout à proximité. D’autre part, cette organisation de la cité permet au visiteur de voir partout vivre réellement la population. Cela lui permet aussi d’avoir à boire et à manger partout où il se trouve et à tout moment de la journée. Les autres villes d’Europe que je connais ne permettent pas toutes ces possibilités à la fois.      

Le passé négrier : Le beau bateau sur le port - réplique de ceux qui voguaient sur les océans à l’époque de l’esclavage – rappelle à tous que ce peuple a écrit aussi une longue page de l’histoire de la navigation. Il permet de comprendre dans quelles conditions voyageaient non seulement l’équipage mais aussi les esclaves embarqués. A visiter absolument.      

            En privilégiant l’usage du vélo plutôt que celui de la voiture, en optant pour le cosmopolitisme social et le commerce de proximité, la Hollande montre que des voies pour le mieux-vivre existent. Il nous reste à oser. 

Raphaël ADJOBI

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23 août 2009

Visiter Amsterdam et s'instruire

                     Visiter Amsterdam et s’instruire

            Les voyages ne forment pas que la jeunesse ; chacun le sait, sauf peut-être la jeunesse. Raison pour laquelle ils ont, dans les siècles passés, abondamment nourri la littérature. A vrai dire, aujourd’hui on ne voyage pas ; on est transporté d’un lieu à un autre. Et une fois à destination, on cherche à satisfaire ses yeux et à profiter des tables locales. Les impressions de voyages d’aujourd’hui se limitent donc souvent à une collection de « bizarreries ».

            Pour ma part, mon récent séjour à Amsterdam m’a beaucoup appris et ne me permet plus de me contenter des habitudes. Je voudrais ici vous livrer mes impressions et mes analyses qui motivent cette conviction. Le futur voyageur pourra tirer profit de certains détails. Vos impressions et vos analyses personnelles seront aussi les bienvenues.

Amsterdam_Maison_flot

Arrivée et installation : Un premier contact avec le métro assez décevant parce que les  noms des stations sont en petits caractères. Difficile de savoir où l’on se trouve. De ce point de vue, Paris est imbattable en efficacité. Préférez le tramway en toutes circonstances. Les distances entre les différents sites se font facilement à pied. Aussi, n’hésitez pas à choisir un hôtel qui vous semble loin du centre. L’immensité d’Amsterdam sur une carte n’est qu’un trompe-l’œil.

La ville ou le vélo est roi : C’est souvent ce que l’on entend dire d’Amsterdam. La réalité dépasse les paroles. Imaginez la ville de Paris vidée des trois quarts de ses voitures et dotez-la de parkings à deux niveaux pour les vélos et vous avez Amsterdam !   

Donc peu de voitures en circulation. Tout le monde est à pied ou à vélo. Tout à été prévu pour que chacun puisse l’utiliser quotidiennement, même pour accompagner les enfants à l’école ou pour aller faire ses courses. Toutes les rues, les nationales, et mêmes les larges voies autoroutières reliant la ville aux banlieues sont doublées d’une piste cyclable et d’une voie piétonne ; et dans les deux sens s’il vous plaît ! Mais attention, les cyclistes vont vite ! Et le piéton n’a pas intérêt à « squatter » leurs voies. 

Il semble que les suisses ont également une vieille et grande pratique du vélo. Mais le phénomène, sans doute moins frappant, n’a pas retenu mon attention lors de mon séjour dans les années 90. Alors qu’en France tout est fait pour la voiture, en Hollande tout est fait pour que son usage ne soit pas nécessairement quotidien. Une vraie culture du vélo alors qu’en France il n’est qu’un loisir.      

Amsterdam_raph

Belle leçon pour les pays en développement : Que ceux qui croient que le vélo-taxi est la marque des pays sous-développés revoient leurs leçons d’écologie. La Hollande pratique le vélo-taxi, le bateau-taxi, le bateau-bus. La politique du tout pour la voiture qu’affectionnent de nombreux pays européens comme la France et l’Espagne (les deux pays que je connais) et que copient les pays africains et sud-américains rend très difficile - pour ne pas dire impossible - une vraie politique écologique en matière de pollution atmosphérique. D’autre part, le tout voiture génère un aménagement du territoire de plus en plus compliqué rendant les déplacements de moins en moins commodes hors les locomotions motorisées.

Être en retard peut parfois s’avérer un atout. Avant les années 80, le réseau routier espagnol était celui d’un pays sous-développé. En tenant compte des erreurs des pays plus avancées dans ce domaine, l’Espagne dispose aujourd’hui d’infrastructures routières nettement plus commodes que la France. En se montrant attentifs aux expériences étrangères, les pays africains peuvent donc bâtir un avenir plus commode et plus écologique.

Raphaël ADJOBI         

Photo 1. Maison flottante. L’eau étant omniprésente, les maisons flottantes sont ici des habitations ordinaires.                  

Photo 2. Amsterdam est une ville qui ose le mélange des architectures : anciennes, modernes, de style étranger comme cette immense construction de style pagode rappelant l’Asie. On apprécie aussi le mélange des saveurs du monde en gastronomie.

8 août 2009

Un don (de Toni Morrison)

                                              Un don

Un_don_de_toni_M                (Toni Morrison)

            Un don est un roman qui demande une attention permanente et suscite régulièrement des questions quant à l’identité des personnages. En d’autres termes, on peut être souvent perdu. Il est donc conseillé de ne pas l’avoir entre les mains dans un moment où l’esprit est trop agité.

            L’Histoire du roman se situe au XVII è siècle, aux débuts de la traite négrière atlantique. Ici, les événements précèdent les périodes rudes de l’asservissement des nègres peint dans Beloved auquel Un don  reprend un peu le style à la fois poétique et brutal. C’est l’histoire de plusieurs vies brisées, non pas par la dureté des conditions du travail infligé aux esclaves (indigènes, noirs ou blancs), mais par la simple difficulté d’être et de s’adapter à cet univers chaotique qu’était le nouveau monde se remplissant d’aventuriers, misérables, condamnés et bannis venus d’Europe.

            Jacob Vaark qui a hérité d’une terre mène une vie de fermier et de commerçant dans cette Amérique où tout semble possible. Il va peu à peu se construire un petit univers apparemment à l’abri des souffrances qui guettent ce monde esclavagiste qui lentement mais sûrement fabrique des chaînes aux pieds des humains. D’abord, il achète une esclave indigène de 14 ans, Lina. Mais elle sera plus une aide en attendant qu’il prenne femme. Puis il épousera Rebekka, une Européenne comme lui. Les deux femmes se jalouseront avant de devenir complices et inséparables. Enfin arrivent deux fillettes noires : Sorrow recueillie des eaux par des bûcherons et Florens, que Jacob obtient en paiement d’une dette. Parce que par prudence le fermier ne voulait pas de la main-d’œuvre masculine à la maison, il se contentait de louer les services de deux esclaves blancs d’une propriété voisine dont l’un rêve de racheter sa liberté sans cesse compromise. Pour achever son œuvre de bâtisseur d’un monde qui prospère, Jacob entreprit la construction d’une nouvelle demeure aux dimensions de ses rêves. Pour cela, il eut besoin du concours d’un ferronnier noir libre. Voilà donc le décor et les protagonistes. Mais tout cela se trouve dans le désordre dans le roman.

            Il ne restait plus à Jacob Vaark et à Rebekka qu’un héritier pour espérer faire prospérer ce nid de bonheur. Mais la maladie et la mort permettra très vite une réflexion sur la viabilité d’une telle vie fondée sur un noyau à la Adam et Eve loin de tout clan, de toute famille, de toute tribu.    

            

Un don n’est pas un livre d’action comme on l’entend au cinéma. C’est le récit du passé et la vie de chacune des domestiques noires de jacob Vaark qui lui donne toute sa dimension déchirante. Surtout Lina, l’indigène, et Sorrow nous renvoient aux conditions de l’arrachement à la terre des ancêtres ainsi qu’aux conditions du voyage en bateau. Mais si les souvenirs sont des images brèves parce qu’ils sont ceux de l’enfance, ils nous instruisent beaucoup sur la difficulté des esclaves à se reconstruire après le traumatisme de l’arrachement brutal à leur lieu de naissance et de vie ordinaire. Quant à la vie de Florens (la narratrice, quand le récit n’est pas à la 3è personne) ce sont ses rêves que l’ont suit et qui nous font espérer que quelque chose de nouveau peut naître de ces esclaves dans ce nouveau monde. 

            Un don est la peinture de l’innocence brisée. Parce qu’il est question de l’enfance meurtrie, donc de l’innocence, ce livre apparaît comme une somme d’images fugaces, incohérentes, anarchiques dans leur association. On peut noter par ailleurs que rarement, la littérature traitant de l’esclavage a fait la part belle à ceux qui, volontairement ou par inclination naturelle, ont choisi une autre voie que celle du brutal asservissement de l’homme avec la productivité pour seule finalité. En mêlant le passé et le présent, Un don laisse penser que le rêve était possible dans le nouveau monde. Mais un rêve qui devient vite une utopie parce que rattrapé par la réalité.

Raphaël ADJOBI

Titre : Un don (193 pages)

Auteur : Toni Morrison

Traduit de l’anglais par Anne Wicke

Editeur : Christian Bourgeois éditeur

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