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Lectures, analyses et réflexions de Raphaël
7 novembre 2020

Des barricades pour aider à l'installation d'un gouvernement de transition en Côte d'Ivoire (Raphaël ADJOBI)

               Des barricades pour aider à l’installation

    d’un gouvernement de transition en Côte d’Ivoire 

Conseil national de transition

          Grâce à la désobéissance civile, les populations ivoiriennes ont réussi à rendre non-crédible le résultat des élections présidentielles du 31 octobre 2020. L’illégitimité de celui qui est déclaré élu est attestée sur le plan national et international. Cependant, depuis l’annonce de la mise en place du Conseil national de transition (CNT) avec à sa tête l’ancien président Henri Konan Bédié – doyen des hommes politiques – la fièvre de la désobéissance civile est retombée comme si le peuple avait vaincu le dictateur Alassane Ouattara. Et pourtant, il suffit de regarder la Côte d’Ivoire pour constater que derrière ce calme apparent plein d’espoir en l'avenir du CNT, c’est l’ancien gouvernement qui garde la main sur les institutions et les affaires du pays. Ce qui lui permet de continuer à emprisonner impunément ses adversaires d'hier comme s’il n’y a rien de nouveau sous le ciel de la Côte d’Ivoire.

          Force est donc de constater qu’il ne suffit pas de créer un Conseil de transition pour gagner la guerre contre un dictateur. Il faut des stratégies fortes pour faire basculer les institutions de son côté. Qu’avaient prévu les membres du CNT dans le cas où le pouvoir illégitime se maintiendrait ? Apparemment rien. Quelques membres emprisonnés ou assignés à résidence ont suffi pour réduire ce nouvel organe politique à l’inaction. Nous voilà revenus à notre point de départ. Henri Konan Bédié et ses amis croyaient-ils peut-être que pour leurs beaux yeux les présidents des institutions et les commandants des armées viendraient à leurs pieds faire allégeance ? Une chose est certaine : si le calme semblable à une lassitude maladive dans laquelle semble désormais se complaire les Ivoiriens persiste, si ceux-ci n’ont pour seul objectif que la reprise immédiate de leurs activités, alors chacun peut être certain qu’il est condamné à supporter la dictature actuelle jusqu’à la mort d’Alassane Ouattara ! Oui, si une stratégie efficace n’est pas mise en place pour étouffer son pouvoir, il n’aura aucune raison de le céder.

          Monsieur Mamadou Koulibali, président de Lider, a tort de dire qu’il ne lui appartient pas de donner de mot d’ordre aux Ivoiriens. Il a tort de ne pas suivre l’exemple de Laurent Gbagbo en 2000 et celui de Charles Blé Goudé en 2004. Il semble avoir vite oublié que c’est le mot d’ordre de désobéissance civile lancé par Henri Konan Bédié qui a contribué à rendre illégitime le résultat des élections du 31 octobre dernier. On ne fait pas une révolution avec des leçons de morale. On peut ne pas crier des mots d’ordre sur tous les toits, mais on peut et on doit faire parvenir des mots d’ordre à ceux qui agissent sur le terrain. Tout combat suppose des stratégies. Tout leader politique doit être conscient qu’il y a des moments où les populations ont besoin de savoir qui elles doivent suivre et dans quelle direction elles doivent aller. Et aujourd’hui, le moment est favorable pour cela. C’est d’ailleurs ce que Guillaume Soro a bien compris et a tenté de faire malgré les statuts de traître et de bourreau attachés à sa personne depuis plus d'une décennie. Si malgré cette mauvaise réputation beaucoup de ses compatriotes ont écouté son appel, c’est parce qu’il s’est toujours vanté de posséder une armée qui lui obéirait au doigt et à l’oeil. Malheureusement pour lui, Alassane Ouattara n’est pas novice dans l’art de la traîtrise et sait parfaitement comment se comporter avec les traîtres. Aux dires du commandant Abdoulaye Fofana, Ouattara a pris soin de corrompre tous les hauts responsables de l’armée ; une armée qui avait d’ailleurs reconnu, avant la crise post-électorale de 2010, qu’elle était financée par le chef du RDR. Ouattara a donc pour ainsi dire miné le terrain sur lequel comptait Guillaume Soro pour rebondir.

          A vrai dire, Guillaume Soro est un fanfaron. Il n’a jamais eu d’armée en Côte d’Ivoire. Si aux yeux des Ivoiriens il est coupable de crimes de guerre au même titre que les rebelles d’hier, c’est parce qu’il fut leur porte-parole auprès de l’opinion publique nationale et internationale. D’autre part, il était le paravent officiel d’Alassanou Ouattara qui ne voulait pas à l’époque apparaître comme le commanditaire et le bénéficiaire de la rébellion. Ainsi, à force de jouer le porte-parole et le paravent, Guillaume Soro, alors chargé de serrer les mains des Blancs et insulter Laurent Gbagbo sur les chaînes de radio et de télévision, a fini par se convaincre qu’il est le chef de l’armée qui a aidé Ouattara à parvenir au pouvoir avec le précieux concours des Français. En réalité, il n’en était que le bonimenteur ! Si Guillaume Soro avait une armée, celle-ci ne serait pas restée sans quelques remous lorsqu’il a été débarqué du perchoir de l’Assemblée nationale et surtout lorsqu’il a été contraint à l’exil d’une manière peu élégante. Retenons que Guillaume Soro s’agite pour que demain, si l’armée bascule du côté du Conseil de transition, il puisse s’en attribuer la gloire, à la manière de la mouche du coche de Jean de La Fontaine. D’ailleurs, les médias français qui donnent beaucoup d’importance à son récent appel aux Ivoiriens, allant même jusqu’à le comparer à celui de Charles de Gaulle le 18 juin 1940, doivent nous inciter à la méfiance. La France aimerait sûrement garder son cheval de Troie pour la sécurité de ses affaires. Prenons donc soin de ne pas participer à l’exagération de la portée des boniments de Guillaume Soro sur les événements en cours en Côte d’Ivoire. Sachons tout simplement que tous les éléments de l’armée ne sont pas fidèles à Ouattara, tous ne sont pas des ressortissants des pays voisins. Nous pouvons donc aider ces éléments-là à agir en nous aidant nous-mêmes.

    Le deuxième acte de la désobéissance civile maintenant !

          Pour triompher de la dictature ouattariste, quel moyen reste-t-il finalement aux Ivoiriens ? Des barricades ! Oui, de vraies barricades, solides comme durant les révolutions européennes des siècles passés, pour étouffer Abidjan et la pousser à la révolte populaire ! Je l’ai dit et le redis ici : dans une démocratie, les manifestations publiques visent avant tout à attirer l’attention des autorités de l’État sur une situation sociale ou politique qui exige une réponse satisfaisante. Malheureusement, on n’obtient rien en agissant ainsi avec une dictature ; à moins que plusieurs milliers de personnes envahissent la capitale et la paralysent durant plusieurs semaines pour obliger le dictateur à céder le pouvoir. Un tel cas de figure n’est pas envisageable avec l’esprit actuel des Ivoiriens dominés par la peur et l’égoïsme de ceux qui ne se sentent plus assez jeunes pour descendre dans les rues. Il reste donc aux Ivoiriens à dresser des barricades à l’entrée et à la sortie de chaque ville, de chaque village, de chaque quartier pour entraver le mouvement des populations. Ainsi, tous les fonctionnaires auront des raisons de ne pas aller travailler, tous les fournisseurs auront des raisons de ne pas alimenter les marchés, les magasins et le port d’Abidjan. Une organisation qui étouffera économiquement le marché national et arrêtera les exportations vers l'Europe. Et quand les Français n’auront plus les matières premières qui font tourner leurs usines et permettent aux ouvriers de garder leur emploi, eh bien, la France - hier grand ami d’Alassane Ouattara mais aujourd’hui silencieuse - sera bien obligée de lui dire : la France n’a pas d’ami ; elle n’a que des intérêts ! Et Monsieur Ouattara sait bien ce qu’il en coûte d’entraver les intérêts de la France.

          Il faut donc que chaque ville, chaque village et les quartiers ou agglomérations d’Abidjan érigent des barricades solides en signe de protestation pour un changement radical de régime en Côte d’Ivoire. Pour réussir, cette action doit commencer partout en même temps ! Il n’est pas question de retomber dans les huit années de négociations du régime de Laurent Gbagbo avec les rebelles de Ouattara. On ne négocie pas avec un régime de traîtres et d’égoïstes sans foi ni loi. Il faut prendre le risque de sauver l’avenir de nos enfants, de notre famille plutôt que de le laisser entre les mains d’un dictateur sans parole et sans scrupule qui vit désormais dans la peur d’être jugé et condamné par les Ivoiriens. N’acceptons pas que cet homme fasse de la côte d’ivoire et de chacun de nous ce qu’il veut. C’est désormais la nouvelle forme que doit prendre la désobéissance civile jusqu’à ce que la France qui a placé Ouattara à la tête de la Côte d’Ivoire comprenne qu’il est usé à force de mal servir sa préfecture.

          Je voudrais pour terminer adresser cette pensée de Henry David Thoreau (1817 – 1862) – auteur de La désobéissance civileà tous les présidents des institutions ivoiriennes et surtout aux commandants des armées de côte d’Ivoire : puisque la machine du gouvernement « est d’une nature telle qu’elle vous oblige à vous faire l’agent d’une injustice à l’égard d’autrui, il faut enfreindre la loi et faire de votre vie une contre-friction pour gripper la machine ».

Raphaël ADJOBI

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