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Lectures, analyses et réflexions de Raphaël
22 juin 2012

Le Sauvage et le Préhistorique, miroir de l'homme occidental (de Marylène Patou-Mathis)

                                    Le Sauvage et le Préhistorique,

                                     miroir de l’homme occidental

                                                (de Marylène Patou-Mathis)

Le sauvage et le Préh

             Si la parution de ce livre a échappé à l’attention de nombreux amoureux de l’histoire des sciences humaines, c’est assurément la faute de l’auteur et de son éditeur pour le choix fantaisiste de son titre. Derrière sa formulation à la fois très généraliste et poétique, Le Sauvage et le Préhistorique, miroir de l'homme occidental cache en réalité un véritable trésor : la foisonnante et passionnante histoire des théories scientifiques du XIXe et XXe siècles et leur transformation en idéologies dévastatrices dont les conséquences persistent aujourd'hui encore. En d'autres termes, Marylène Patou-Mathis explique ici la construction scientifique du racisme et de l’eugénisme (théorie de la race pure) qui ont servi de moteurs ou de justificatifs à des actions de grande envergure menées par les Européens contre les Noirs et les Juifs durant les deux derniers siècles.

            Quand il est question du racisme ou du nazisme, bien souvent les écrits nous donnent le sentiment de voir ces sujets sous un angle particulier ou comme des phénomènes circonscrits à une époque ou à un lieu. Et quand il s'agit de remonter à leurs sources, les informations s'avèrent souvent parcellaires, peu satisfaisantes ou trop générales pour servir d'arguments explicatifs dans un débat sérieux. Ainsi, dans notre société moderne, seules les expériences vécues demeurent depuis toujours les preuves les plus solides contre les négationnistes et les attitudes complaisantes à l'égard des personnes qui tiennent publiquement des propos racistes. Avec ce livre, nous remontons à la source du racisme et de l'eugénisme, idées prétendument scientifiques qui ont durablement modifié le comportement de l'Européen à l'égard de l'Autre, particulièrement le Noir qu'il a vu apparaître des confins des contrées lointaines. 

            Depuis le XVIe siècle - avec la découverte de l'Amérique et de l'intérieur de l'Afrique - l'idée "scientifique" la plus répandue était que « la civilisation est l'aboutissement d'un long cheminement marqué par des étapes successives, ayant débuté par la sauvagerie ». Dans cette vision d'une progression linéaire de l'humanité, l'homme blanc se plaçait au sommet de la chaîne, comme l'aboutissement de cette évolution, et le "Sauvage" (l'Amérindien et le Noir) relégué au premier étage visible de l'humanité. En effet, à la faveur de la grande passion de tout collecter, tout comparer et tout hiérarchiser pour trouver la diversité ou l'unité de la nature, les Européens vont hiérarchiser aussi les êtres humains.

            Dans son livre, Marylène Patou-Mathis montre que peu à peu, surtout à partir du XIXe siècle, les recherches scientifiques vont - grâce à l'esclavage et aux débats qu'il suscite - tendre essentiellement à démontrer la place des Noirs dans "l'échelle des êtres". Tout est alors bon pour charger le Noir de tout ce qui pourrait confirmer son infériorité et justifier sa mise en esclavage puis sa colonisation. Non seulement on s'efforcera de le rapprocher du singe, mais encore on fera de sa couleur qui se situe à l'opposé du blanc - considéré comme la couleur humaine parfaite - une preuve irréfutable de son caractère primitif. Il semblait donc évident d'affirmer que des êtres aussi proches de l'animalité ont une intelligence inférieure et sont incapables de pensées métaphysiques. L'auteur montre que la diffusion du livre de Darwin au milieu du XIXè siècle ne fera que dynamiser cette tendance à hiérarchiser les êtres et à inférioriser le Noir. En clair, la science biologique s'était octroyé le monopole de la définition de l'être humain.

            Il ne faut donc pas s'étonner qu'ainsi méprisés, déshumanisés, les Noirs aient subi la barbarie des Européens qui, dès lors, pouvaient pratiquer la traite et l'esclavage sans scrupule et sans remords. D'autre part, une fois convaincus de l'infériorité des peuples dits "Sauvages", coloniser leur territoire devient une entreprise civilisatrice. Pourtant, remarque l'auteur, « certaines valeurs humanistes comme les droits de l'homme ou la laïcité ne seront jamais introduites dans les colonies ». En clair, civiliser les Sauvages certes, mais il n'est pas question de les hisser sur un même pied d'égalité avec les Blancs en leur permettant de jouir des mêmes droits.   

            Le livre souligne aussi l'apparition au milieu du XIXè siècle d'une autre facette du racisme : l'eugénisme, ce néologisme inventé par Galton pour désigner la « science de l'amélioration des lignées humaines ». Cette idéologie se souciait de démontrer l'existence d'une race parfaite. C'est de cette époque que naît le concept de "race aryenne", ce peuple imaginaire idéal qui constituerait la race la plus évoluée de l'humanité ! L'Europe avait atteint, avec cette idéologie qui va passionner des groupes extrémistes (Ku Klux Klan, nazis puis néonazis et skinheads), le paroxysme de sa volonté de hiérarchiser les êtres.

            Mais n'allez surtout pas croire que les scientifiques étaient tous et toujours du même avis. Le foisonnement des théories est d'ailleurs la grande caractéristique de cet ouvrage. Le lecteur a d'ailleurs constamment le sentiment qu'il tient entre les mains un compte rendu de la chronologie des recherches scientifiques en archéologie (outils) et en paléontologie (fossiles d'animaux) avec les controverses qui les ont nourries. Malgré cette multiplicité de théories et de controverses, le livre demeure toujours passionnant ; surtout quand il touche aux méthodes de travail de l'époque. Les premiers scientifiques n'étaient nullement des hommes de terrain mais hommes de "cabinets" ou de bureaux. Leurs travaux étaient basés sur les récits des commerçants et des colons, en d'autres termes sur des récits plus ou moins fantaisistes. Afin d'illustrer leurs travaux, à partir de la fin du 18e siècle, le pillage des objets des colonies a été réalisé de manière très organisée. Derrière cette apparente volonté de faire avancer la science dans une meilleure connaissance des régions colonisées, se cachait en fait une autre réalité : ce pillage et « ces recherches scientifiques servaient avant tout à la nation colonisatrice, à forger son identité en particulier, et non à connaître les peuples lointains, l'Autre ». En clair, l'Européen s'offrait les moyens d'asseoir de manière définitive sa suprématie dans l'ordre humain. Et cela a abouti de manière très visible à cette multitude d'expositions coloniales à travers l'Europe et l'Amérique du Nord jusqu'au début du 20è siècle.

            Pourquoi donc l'auteur n'a-t-il pas intitulé son livre "La construction scientifique du racisme" ? Sans avoir entendu parler de son contenu, on peut passer à côté de cet excellent travail de recherche avec son passionnant foisonnement de théories et de contradictions. Pourtant, sur le racisme, ce livre mérite d'occuper un rang privilégié dans toutes les bibliothèques.

Raphaël ADJOBI            

Titre : Le Sauvage et le Préhistorique,

            Miroir de l'homme occidental, 399 pages

Auteur : Marylène Patou-Mathis

Editeur : Odile Jacob

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11 juin 2012

Alassane Ouattara cherche désespérément une opposition pour redorer son image

                                                  A lire sur

Alassane Dramane 0003           Mes pages politiques

   Alassane Ouattara cherche

désespérément une opposition

     pour redorer son image 

9 juin 2012

Esclaves des îles françaises ou Lettre sur les Noirs de Bernardin de Saint-Pierre

                         Esclaves des îles françaises

     (ou Lettre sur les Noirs de Bernardin de Saint-Pierre)

Esclaves des îles Frç            Ce petit livre de 71 pages est une analyse de la Lettre XII, intitulée "Des noirs", extraite du Voyage à l'Îsle de France de Jacques-Henri-Bernardin de Saint-Pierre datant de 1769. Jean-Charles Pajou qui nous présente cette lettre nous donne l'occasion de découvrir un texte de l'auteur de Paul et Virginie qui nous permet d'aller beaucoup plus loin dans la connaissance de sa défense des Noirs.

            La Lettre sur les Noirs est un texte bref de 9 pages. Elle commence par la présentation de la population de l'île faite d'Indiens Malabares de Pondichéry et d'insulaires de Madagascar. Une description physique et le caractère de chacune de ces deux communautés noires sont donnés ; puis suit la narration de la vie des esclaves. Leur seul mauvais traitement montre excellemment la sauvagerie des colons. 

             Afin de frapper l'esprit de ses contemporains, Bernardin de Saint-Pierre fait usage de formules percutantes pour ponctuer chacune de ses descriptions. Pour montrer le ridicule des colons en matière de religion, on peut lire : « le soir, de retour dans leurs cases, on les fait prier Dieu pour la prospérité de leurs maîtres ». Pour souligner l'ignominie de la technique des colons pour entretenir l'esclavage : « Nous excitons parmi eux la guerre et la discorde, afin d'avoir des esclaves à bon marché ».  Ou pour montrer comment - afin d'obtenir le café et le sucre pour le bonheur des Européens - la culture de deux végétaux a fait le malheur de deux parties du monde : « on a dépeuplé l'Amérique afin d'avoir une terre pour les planter ; on dépeuple l'Afrique afin d'avoir une nation pour la cultiver ». Enfin, Bernardin de Saint-Pierre termine son texte par s'indigner de l'attitude des philosophes qui, selon lui, « (n'ont)  parlé de l'esclavage des Noirs que pour en plaisanter ». 

            C'est donc un beau texte au ton percutant que Jean-Charles Pajou nous invite à découvrir. Dans son introduction, il nous présente non seulement la vie de Bernardin de Saint-Pierre mais aussi la lettre sur les Noirs dans l'ensemble de l'oeuvre de l'auteur. Par ailleurs, la plus grande partie de ce petit livre est constituée par l'analyse détaillée qu'il donne des vues de l'auteur de Paul et Virginie sur la question coloniale au XVIII è siècle. Le lecteur appréciera les polémiques nées autour des idées de cet écrivain ainsi que les brèves histoires des îles de France (Maurice) et de Bourbon (Réunion).

Raphaël ADJOBI

Titre : Esclaves des îles françaises

(Lettre sur les Noirs de Bernardin de Saint-Pierre), 71 pages

Présentation : Jean-Charles Pajou

Editeur : Les éditeurs Libres, 2006

3 juin 2012

Entretien avec Shlomit Abel

                               Entretien avec Shlomit Abel

                              (auteur du blog RésistanCIsraël)

Je poursuis ma série d'entretiens avec, pour la première fois, une blogeuse. Il faut avouer qu'elles ne sont pas légion sur le net. Je vous invite donc à découvrir Schlomit Abel qui tient le blog "RésistanCIsraël"Shlomit Abel 0003 résolument tourné vers les actualités ivoiriennes.

1. Qui est Shlomit Abel, derrière le blog "Résistancisraël" ?

Shlomit est une femme de 55 ans qui est montée de France en Israël il y a 17 ans, avec un époux, Eliahou Abel, et 4 enfants. C’est une aventure de foi et d’obéissance, un peu folle aux yeux de beaucoup, qui nous a poussés, mon mari et moi à nous solidariser d’Israël et du peuple juif, au point de vouloir être partie prenante de son destin, il y a plus de 26 ans de cela ; un chemin d’obéissance qui nous a poussés à faire des choix difficiles, familialement, socialement, culturellement, financièrement. 

2. Pourquoi appeler "Résistancisraël" un blog totalement dévoué aux actualités ivoiriennes ?

J’ai eu l’idée du Blog, Eliahou celle de son nom : résistanCIsraël ; c’est un seul mot, avec la Côte d’Ivoire « CI » au centre ; la résistance, pour moi à l’époque c’était le mot gravé par la huguenote Marie Durand  dans le roc,  pendant sa captivité de 38 ans (trente-huit ans !) à la « tour de Constance » d’Aigues-Mortes : une résistance que rien ni personne ne peut écraser ; elle ne dépend pas des hommes, c’est une attitude, on peut être libre, même dans les chaînes, parce que le pire dictateur ne pourra pas m’empêcher de penser, de prier, de m’élever, alors qu’il ne souhaite que m’écraser, m’anéantir... 

Israël, c’était notre point d’ancrage ; “Pour que triomphe la vérité, et que de Sion soit béni, consolé et fortifié tout le peuple ivoirien”, dit l’en-tête du blog. ResistanCIsraël, c’est la Côte d’Ivoire dans sa vocation de résistance à l’oppresseur, adossée à Israël, au Dieu d’Israël.

Bien sûr, dans mon esprit, ce blog était destiné d’abord à mes amis et connaissances, chrétiennes et juives, en France et en Israël. Ce bouleversement que j’ai connu, que j’ai communiqué à Eliahou, que nous avons vécu ensemble quand la France a bombardé le palais de SEM Laurent Gbagbo, je pensais naïvement que d’autres personnes le partageraient, partageraient le même cheminement, et que ce blog s’adresserait prioritairement aux occidentaux désireux de s’informer. En fait, il est plus visité par les africains que par les blancs. Deux fois j’ai publié un article sur un site francophone israélien que j’avais écrit pour les ivoiriens, mais je ne le ferai plus. S’il y a eu quelques réactions neutres, voire positives, l’ensemble était tellement hostile, méprisant, tellement absurde, qu’il m’a fallu trois jours pour m’en remettre. 

3. Qu'est-ce qui pousse une non-ivoirienne ne résidant pas dans le pays à s'impliquer à ce point dans le combat de la "Résistance ivoirienne" ?

La Côte d’Ivoire s’est imposée à moi, à nous, aussi radicalement qu’Israël, 25 ans plus tôt ! La découverte d’une amie de France, très branchée sur Israël, puis brusquement  fiancée à un camerounais vivant à Abidjan, m’a poussée à faire des recherches sur la Côte d’Ivoire à l’automne 2010. C’est aussi à cette période, que j’ai eu des échanges très féconds avec un “journaliste” du Nouveau Courrier, l’unique ivoirien que je “connaissais” et qui a été le témoin de ces bouleversements que je vivais ! Cet ami a disparu dans la tourmente du 11 avril 2012 ; je l’ai retrouvé quelques semaines plus tard, il m’a écrit rapidement qu’il était à l’abri, en exil ; je lui ai écrit quelques fois, et puis je ne voulais pas le mettre en danger en communiquant avec lui, parce que je pense que nous sommes un peu surveillés,... et puis maintenant, beaucoup de choses sont censurées, même ici en Israël, dernière en date, l’hymne d’Éburnie qui a disparu de notre blog! 

            Mon implication dans ce combat n’est pas le seul fait de ma volonté, c’est une cause qui m’est tombée dessus, croyez moi ! Rien ne me prédisposait à l’épouser. L’hébreu, bien que nous le comprenions et le parlions,  n’est pas notre langue maternelle ; il reste difficile pour nous d’exprimer en hébreu nos convictions, nos attentes, nos nuances... avec la Côte d’Ivoire nous retrouvions le bonheur de pouvoir communiquer dans notre langue, celle de nos origines et celle comprise de tous les Ivoiriens ! 

Je n’ai jamais milité auparavant, si ce n’est pour Israël, mais jamais avec cette vigueur, cette conviction là ! En fait, c’est la justesse du combat, la personnalité du président Laurent Gbagbo, la maturité des Ivoiriens, leur réflexion, la qualité de leurs articles, leur enracinement dans la foi, qu’elle soit chrétienne ou musulmane qui m’ont mise en route.

4. Apparemment, vous avez choisi de relayer les informations que vous puisez dans des sources diverses plutôt que de publier des productions personnelles. Pourquoi ce choix ? Pourtant, votre dernière contribution à mon blog politique a retenu l'attention du Nouveau Courrier d'Abidjan. Cela ne vous incite-t-il pas à publier pour votre compte ? 

S’il est vrai que la majorité des articles publiés sur le blog sont repris d’autres sources, il m’arrive assez souvent d’écrire ; chez moi c’est généralement sous la forme d’un cri du cœur quand je lis des monstruosités ; Eliahou, c’est d’avantage des articles de fond, de réflexion. Bien souvent, le site Koaci.com  m’aide à sortir de mes gonds et me pousse à coucher sur le papier  ma révolte ! Nos articles sont souvent relayés par d’autres sites amis, et parfois même on les retrouve sur des sites du Moyen Orient, mais pas israéliens, malheureusement ; nous sommes trop anticonformistes, et la politique israélienne étant presque totalement alignée sur celle des Etats Unis...

Nous serions en vérité très heureux, mon mari et moi, de vivre de notre plume, parce que c’est un investissement énorme, si on compte le temps passé à écrire, à sélectionner des articles, les corriger, les surligner. Parfois il y a aussi des problèmes techniques...

Si je viens d’être publiée par le Nouveau Courrier d’Abidjan, c’est vous qui me l’apprenez... Par le passé déjà, - deux fois je crois -, un article paru sur d’autres sites, avait retenu leur attention ; mais ce n’est pas le journal qui me l’a appris, ce sont d’autres blogueurs ! En fait je n’y suis pas abonnée, tout simplement parce qu’en Israël la vie est très chère, et notre situation financière loin d’être mirobolante ! Mais être relayée par le Nouveau Courrier d’Abidjan, oui c’est un honneur! 

5. Que pensez-vous des blogs africains et ivoiriens en particulier ?

L’hiver dernier, au fort de la crise ivoirienne, beaucoup de blogs africains étaient solidaires de ce que j’appellerai le viol de la Côte d’Ivoire ; d’ailleurs je les remarquais souvent à cause de leur engagement aux côtés du président Gbagbo, avant de remarquer qu’ils n’étaient pas ivoiriens ! Mon premier souvenir, c’est Cameroonvoice, Lynxtogo, Ivoirebusiness… Au fil du temps, il s’est même noué une affection, sensible parfois juste par un retour, un merci chaleureux pour une contribution, des encouragements… Pareil pour beaucoup de sites ivoiriens, où des blogueurs sont devenus des amis, des confidents : regards croisés, Abidjandirect, infodabidjan, la Côte d’Ivoire Debout, les blogs français de Saper Aude et Jean Delugio. Il y en a aussi avec lesquels je n’ai aucun lien, aucun contact, peut-être se méfient-ils de moi, peut-être est-ce le fait que je sois juive, et surtout israélienne... Au delà des blogs, il y a aussi le réseau social Facebook qui fonctionne comme une plateforme d’échanges d’informations, et où se nouent beaucoup de relations chaleureuses.

6. On dit souvent que s'engager pour une cause est formateur. Pensez-vous avoir déjà tiré quelque bénéfice de votre engagement dans la "Résistance ivoirienne" ? 

Oui certainement, cet engagement m’a ouvert les yeux sur une réalité insoupçonnée : celle d’un militantisme où il n’y a pas d’un côté ma vie privée et de l’autre les choix politiques. Étant bien entendu que ces choix sont déterminés moins par l’opposition droite-gauche – nous savons malheureusement ce qu’il en est, en France de la « gauche caviar », celle de BHL, de Jack Lang ou de Fabius… -, que par l’opposition vérité-mensonge, justice-injustice. Il en est de même en Israël, où, au fil des alternances politiques, ce qui ressort avant tout, ce sont des intérêts à sauvegarder, une indifférence presque totale à la pauvreté, à la misère et à l’injustice, des promesses jamais tenues, l’ajournement sans fin des mesures destinées au mieux être des populations fragiles.

Depuis que je suis entrée en résistance ivoirienne, je ne suis plus la même: j’ai découvert le mensonge, la fraude, la corruption et l’esclavage érigés en raison d’état !

La parole « Consolez, consolez mon peuple »,(Ésaïe 40) avait scellé mon engagement aux côtés d’Israël, quarante ans après la shoah, parce que j’avais besoin d’apporter ma réparation, une bien piètre contribution par rapport à tout le gâchis qui avait été commis, mais voilà je ne pouvais plus tourner les yeux vers le seul crucifié alors que j’avais découvert tout un peuple crucifié par ceux là même qui s’érigeaient en censeurs et qui lui avaient volé sa place ! 

« Plus jamais cela », et voilà que la France - que l’on ne peut à ce moment-là accuser d’antisémitisme puisqu’elle  vient d’être  victime de la barbarie nazie -, met en place le 25 décembre 1945, le franc CFA qui va plomber sans aucune chance de s’en sortir les colonies françaises d’Afrique - comme cadeau de Noël - à la sortie de ce traumatisme d’une guerre mondiale qui n’a pas épargné beaucoup de familles ; ça vous douche, et vous enlève vos dernières illusions!

Depuis que je suis enfant, un texte biblique a toujours été présent à mes côtés, c’est Michée 6, v. 8 « On t’a fait connaître ô homme ce qui est bon et ce le Seigneur demande de toi, c’est de pratiquer la justice, d’aimer le bien et de marcher humblement avec ton Dieu.» J’ai l’impression de le vivre pleinement dans mon engagement avec la Côte d’Ivoire. A travers lui, je renoue tout simplement avec mon véritable appel, celui d’être au service du Dieu Créateur et libérateur, et ce, depuis Israël qui est si important pour beaucoup d’ivoiriens. Avec eux et le président Gbagbo, j’ose le pari d’affirmer qu’avec Dieu, le Dieu d’Israël, il est possible de remporter la guerre contre le néo nazisme de l’Occident, contre cet asservissement totalement indigne d’une France qui a dévoyé des expressions aussi nobles qu’ « ingérence humanitaire », « communauté » internationale, pour désigner, comme lors de la conférence de Wannsee en 1941, en version déguisée, la plus horrible des dictatures en marche, qui déshumanise l’homme pour mieux l’avilir et le dépouiller. 

Je ne suis rien, je veux simplement proclamer cette vérité qui vient de Sion, cette justice qui vient d’en Haut et qui va rétablir le peuple de Côte d’Ivoire dans son droit, lui ramener son Chef. Comme dit dans l’entête du blog, depuis Jérusalem “bénir, consoler, fortifier”, c’est mon unique ambition ; et par delà mon engagement, c’est moi qui ai été infiniment comblée dans cette quête de sens pour ma vie et celle des Ivoiriens qui veulent que justice leur soit faite, ici et maintenant. 

Entretien réalisé par

Raphaël ADJOBI

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